samedi 10 mars 2018

Notes de lecture sur "Piège sur Zarkass"

Piège sur Zarkass est un roman de science-fiction de l'auteur français Stefan Wul paru en 1958 dans la collection Fleuve Noir Anticipation.

Sur Zarkass, deux agents terriens qui se font passer pour des géologues, cherchent à percer le mystère des Triangles, une espèce extra-terrestre méconnue qui tente de coloniser la planète.

Si Piège sur Zarkass relève bien du genre de la science-fiction par son exotisme typique du planet opera et sa technologie futuriste parfois simplement suggérée, l'intrigue est plutôt portée par une pensée magique dans une atmosphère d'angoisse. Ce sont les thèmes littéraires et fantastiques de la malédiction liée à une civilisation disparue, de la prophétie en attente de sa réalisation et de l'annonce eschatologique d'un sauveur qu'utilise ici l'auteur. Stefan Wul cite d'ailleurs expressément le stéréotype de « la malédiction du pharaon » au cours du récit.

Le récit emprunte également beaucoup au genre du roman d'espionnage, avec des éléments aussi classiques que la filature à pied ou en véhicule, le changement d'identité, le travestissement à but de camouflage, les gadgets technologiques comme les récepteurs radio implantés, etc.

Les Zarkassiens, affublés d'un bec-de-lièvre et de longues dents jaunes, muent régulièrement et sont présentés sous un jour pour le moins primitif du point de vue de la civilisation. Cependant, ils disposent d'un puissant pouvoir psychique qui leur permet d'intervenir sur la matière et même de tuer. Ce pouvoir passe par leur regard. Leur civilisation s'est peu à peu éteinte et leurs plus éminents représentants ont désormais abandonné les anciennes croyances magiques pour l'approche plus rationnelle importée par les colonisateurs terriens.

Personnages principaux

Terriens :
- Laurent, agent secret terrien responsable de la mission ;
- Darcel, ingénieur en mission pour découvrir le secret du sub-espace détenu par les Triangles ;
- Docteur Jaubert, médecin du village de Zaress ;
- Professeur Klaus, archéologue, spécialiste de la civilisation zarkassienne.

Zarkassiens :
- Zinn, porteur de l'expédition ;
- Gozo, agent du gouvernement zarkassien qui surveille les Terriens ;
- Tzécha, surû de la ville de Zaress ;
- Safass-Thin, roi légendaire des Zarkassiens ;
- Xezum, prêtre zarkassien, nouveau roi de Zarkass.


Morceaux choisis

page 7 : Origine des Triangles : Arcturus (à 37 années-lumière) ?
A vrai dire, on ne sait pas grand chose de ces êtres. On n'en a jamais vu en chair et en os (si toutefois ils ont de la chair sur des os). On le sappelle Triangles en raison de la forme de leurs spacionefs, ces grandes ailes deltoîdes qui rôdent dans al constellation du Centaure et font même des incursions du côté de Pluton, aux confins de notre système. 
Je ne sais sur quelles théories s'appuie le monde savant pour affirmer qu'ils viennent d'Arcturus. Bien malin qui pourra dire le contraire.

page 8 : Zarkass
Vous ne connaissez pas Zarkass ? Planète numéro 7 d'Alpha Centauri, atmosphère semblable à la nôtre, race dominante vaguement humanoïde. Libres en théorie, les Zarkassiens sont pratiquement sous notre protectorat.

page 8 : Zone d'influence de la Terre : seulement deux systèmes solaires voisins de 4,3 années-lumière
Les Triangles nous ignorent, bon ! Qu'ils se promènent à l'aise dans nos deux systèmes, baste ! Quoique la chose nous soit désagréable ...

page 10 : Télécommunicateur incorporé
Un picotement à la base du crâne le fit sursauter. Ce n'était pas un moustique mais un appel de la radio. Comme un dégoûtant personnage, il fit semblant de se curer les dents et tourna légèrement sa fausse canine, actionnant ainsi le sélecteur qu'il portait dans son sinus maxillaire. Il entendit une série de chiffres [...] Puis il continua de se curer les dents avec une épingle. En fait, le contact de l'épingle avec obturation métallique d'une prémolaire envoyait un signal codé à des milliers de kilomètres de là.

page 19 : Psychisme des Zarkassiens : télékinésie et télépathie
Ils ont une grande imagination et un psychisme d'une force incroyable, expliqua Laurent. Il suffit que l'un d'eux ait vu bouger une herbe. S'il s'est mis dans la tête qu'il s'agissait d'un esprit, il a involontairement communiqué sa conviction aux autres. Et c'est la force de cette conviction collective qui agite les herbes. Ils créent eux-mêmes le phénomène, mais ils n'en savent rien.

page 30 : Paysage aquatique
Le paysage fut de plus en plus aquatique. L'étendue luisait comme un miroir. Les grandes racines plongeantes des arbres formaient un labyrinthe d'arcades où s'échevelaient des mousses tropicales. Par moments, des bulles de gaz putrides montaient  du fond de  la lagune, libérées par les coups de perche des indigènes. Des paquets de feuilles mortes et d'algues tournoyaient dans le sillage des barquettes. De temps en temps, Laurent reconnaissait parmi ces débris flottants des lambeaux d'épiderme que, trop loin pour craindre une réprimande,  Zinn s'arrachait avec entrain.

page 35 : Apparence imaginée des Triangles
- C'est un Triangle, dit-il.
Il avait fait une espèce de singe à tête de vache avec une antenne plantée entre les deux cornes.

page 37 : Rayon oculaire
Je pense que leur regard émet un flux de neutrons. Même chez l'homme, il y a une différence de potentiel entre les pôles antérieur et postérieur du globe oculaire. Par la volonté, on peut déclencher un rayonnement électromagnétique. L'onde porteuse serait focalisée par le cristallin. Après passage par la pupille, il se créerait une polarisation circulaire du vecteur électrique de ce rayonnement ...

page 56 : Ancienne civilisation
Je n'aime pas les évolués. Je préfère les sauvages, comme Zinn. Les évolués s'habillent à la terrienne, prennent des grands airs et affectent de mépriser leur ancienne civilisation. Car ils ont eu jadis une civilisation brillante basée sur la magie et l'empirisme. Ils ne veulent plus en entendre parler et c'est dommage. Ils ne sont pas doués pour la science et s'épuisent à nous imiter.

page 71 : Sub-espace
- Une bande de quoi ?
- Une bande de Moebius. C'est-à-dire une forme géométrique sur laquelle on a beaucoup travaillé à propos du sub-espace [...]

pages 128-129 : Contrastes civilisationnels
La Capitale avait quelque chose d'énorme. Deux civilisations s'y accouplaient en monstrueux contrastes. 
La rue se perdait dans les hauteurs entre les buildings de verre et d'acier reliés par l'entrelacs des ponts et des chaussées géantes. Des tours de plastique voisinaient avec les temples d'or de l'ancienne religion zarkassienne. Les phares-toupies trônaient au milieu d'énormes arbres-villages , où des pêcheurs zarkassiens nichaient encore comme des  oiseaux. 
Dans les rues basses, près des ports, les attelages de davals tintinnabulaient à côté des autos à glissoir, et les trottoirs roulants passaient entre les tas de fumiers. 
Dans les faubourgs lacustres de l'est, les chenaux et les lagunes portaient encore des radeaux à voiles qui gênaient le passage des hydro-tanks de la police; et des chants de pagayeurs faisaient échos aux coups de gueule des sirènes. Dans l'eau sale dansaient des noix d'acaze et des boîtes de conserve bariolées, au milieu des moires vomies par les usines et souillées par les détritus de marchés indigènes. Et d'anachroniques moulins à vent tournaient encore à l'ombre des cheminées de la Grande Centrale. 
Au cœur de la ville, toute la cité mugissait , sifflait, hululait dans un bruit de foules en délire et de machines, de cris d'animaux et de recommandations bilingues éructées par les diffuseurs des carrefours. Tout cela dans la lumière multicolore des publicités, qui tachaient de bleu, de rouge ou de jaune ici le visage d'un mendiant dévoré de lèpre noire, là le sourire éclatant d'une femme de diplomate terrien, plus loin les traits convulsés d'un bateleur cracheur de flammes ou bien l'expression hermétique de deux policiers à visière métallique.

page 163 : Salle de danse
Il sentait chaque dalle fléchir imperceptiblement sous ses pas et se félicita que le courant fût coupé. Il connaissait ce genre de fastueuse fantaisie et savait qu'en temps normal, chaque dalle émettait une discrète note d'orgue. C'était une salle de danse où les pas des danseurs produisaient eux-mêmes une musique parfaitement accordée à leur rythme.

pages 166-167 : Les mouches bleues
L'évidence frappa Darcel comme un coup de poing. Les mouches étaient les Triangles ! Cette race d'insectes intelligents avait parfaitement compris qu'il en fallait pas espérer capter les confiance des Zarkassiens en se présentant telle qu'elle était. Une mouche-ambassadeur ! Une mouche-attaché militaire ! Une division blindée de mouches-soldats! Cela eût d'abord provoqué le rire puis rapidement la terreur. Et de la terreur à la haine ... !

page 169 : Momie-piège (ou plutôt : Mue-piège)
Il haleta de nouveau, raconta en phrases hachées que les médecins n'y comprenaient rien, parla d'épiderme réactivé, de cellules migratrices, de lente pénétration et de métaplasie progressive et parasite d'une physiologie dans une autre. 

page 171 : Inhalateurs d'hydrogène
Ils respirent bien un mélange à haute teneur d'hydrogène et leur température de confort se situe autour de moins soixante. D'ailleurs, nous savons par nos services qu'ils ont déjà des bases fantastiques aux pôles de Zarkass.

page 177 : La Science contre la Superstition

page 180-181 : Science indiscernable de la magie
La magie n'est que de la science qui n'a pas encore été mise en équations. 

page 183 : Safass-Thin pro-Terriens
Ô mon peuple. Tu as pris la Science que t'offraient les Terriens. Et cela était juste, et cela était bien. Mais tu as renié tes anciennes pratiques. Et cela était mal. Et les Terriens ne te le demandaient point. Pourquoi renier une science pour une autre et pourquoi ne pas garder les deux ? La science de vos frères prend tout par le bas et le détail, la vôtre tout par le haut et l'ensemble. Les deux routes se croiseront et il est dit qu'il en sortira de grands bienfaits pour tous.

page 188 : Xezum roi-prêtre héritier
[Xezum] a parlé d'assistance mutuelle, d'accords culturels, d'éternelle solidarité ...

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