L'univers
dans lequel évolue le minable détective de classe "R",
John Difool, existe à travers un système complexe d'oppositions
complémentaires. L'histoire elle-même ne dure pas très
longtemps, peut-être une affaire de quelques jours, quant à savoir
quand est-ce qu'elle se passe, cela n'a pas d'importance. Le tout est de savoir
qu'elle s'inscrit à la fin d'un cycle, celui de la vie de l'entité
qui personnifie cet univers. Ici, le destin de deux galaxies se rencontrent,
celle des humains avec celle des bergs ; cette dernière porte le nom
d'Atrii : la planète mère évolue dans un système
tri-solaire, dit "proche du noyau", et s'appelle Ougar-Gan ; "
c'est au centre du désert des trois commandements que se dresse la
gigantesque masse de Ouror, la fourmilière-matrice originelle, vieille
de 120 000 ans, siège de l'ovulation primordiale et repaire de la bien
aimée proto-reine Barbarah" ( IV.2) ; la galaxie Berg compte 78
billions d'individus, tous d'apparence identique et nés d'un même
père ( dont ils sont à l'image) et d'une même reine (la
proto-reine). La galaxie humaine comporte 22 000 planètes majeures
dont nous rencontrons Demos (IV.2), Alix III, Badmeon (VI.2), Nace du cygne,
Barnab, Del Rey III et Laylin (V.1.3) ... l'action se déroule sur quatre
des principales, Ter 21 où débute l'histoire et d'où
viens Difool, la planète d'or, Aquaend et Techno-Géa.
Aquaend, au premier
abord une planète-prison constituée intégralement d'eau,
révèle, en son sein, l'existence d'une colonie d'êtres
humains parfaitement adaptés à la vie aquatique. Elle sera l'un
des berceaux de la résistance face au déferlement de la ténèbre.
Technogéa
est le siège des Technos. Elle est entièrement métallique
et automatisée. Protégée par un bouclier psychique, seuls
les bergs, de constitution organique différente, pourront la faire
tomber aux mains de la résistance. Ainsi chassés, les Téchniciens-Technos
se réfugieront sur "Étoile de Guerre", une véritable
forteresse, machine de guerre "capable de détruire un système
solaire en dix secondes, nid géant bourré d'assassins jusqu'à
ras-bord" (V.1.1).
Nous découvrons
au fil de l'action, un foisonnement d'artefacts, de paysages, de planètes,
de concepts, qui, dans leur originalité, donnent à cet univers
une dimension cognitive propre. Le lexique comporte bon nombre de néologismes
qui, encore une fois, apportent à la consistance d'un mode de pensée
propre : les gens engoncés dans leurs conapts, sont omnibulés
par la tri-D qui leur retransmet le dernier clonage du prèz tandis
que les robfliks tentent de calmer la rébellion qui menace la cité-puit.
L'empire est vaste, le pouvoir impérial y est incarné par l'impéroratriz
résidant dans son palais sur la planète d'or. Chaque système,
caste ou autre y est représenté dans une assemblée dont
la présidence est tenue par l'Imam (chef de la garde pourpre ainsi
que de l'intégrité religieuse ).
Les trois
premiers tomes nous permettent de visiter de fond en combles Ter 21 selon
un parcours initiatique qui nous même des niveaux les plus élevés
où se situe le vaisseau du président, les quartiers aisés
de l'aristocratie dont le symbole est l'auréole, jusqu'au centre-terre
sous le lac d'acide, en passant par les niveaux intermédiaires occupés
par le gros de la population. Aussi, au centre de Ter 21, divers passages,
la tour de détritus-vallée, le labyrinthe, la forêt des
cristaux chantants gardée par les sages Arhats et la tour de cristal
au sommet de laquelle se trouve la porte de la transfiguration, permettent
d'accéder à l'île interdimentionnelle des pyramides .
Celle-ci est un plan immatériel sur lequel la fusion des deux Incals
sera opérée afin de créer le vaisseau-étoile.
En définitive,
je dirai que, malgré les termes dimensionnels que l'on peut prêter
à cet univers, il ne semble pas réellement y avoir de sens.
Les objets, les structures et les planètes sont bien à leur
place "physique", mais, chaque chemin emprunté semble pouvoir
mener à une multitude d'autres, si bien que les notions de haut et
de bas s'annulent pour ne laisser apparaître qu'un inextricable réseau
de lieux reliés par des plans métaphysiques, comme dans un cerveau
avec ses neurones et ses synapses . Le regard de chacun des protagonistes
de l'histoire les trompent eux-mêmes, ils ne semblent pas être
véritablement maîtres des situations. Ne seraient-ils que des
marionnettes guidées insidieusement par l'entité rencontrée
à la fin ? Malgré tout, cette entité, le père
de l'univers, semble aussi être l'objet d'une manipulation puisque un
personnage sort "indemne" de ce tourbillon obsessionnel : John Difool.
Un nouvel univers est crée avec pour base, la somme des rèves
humains contenant une vérité "supérieure",
plus sage. Ainsi Difool reste le témoin éternel de son univers,
de manière, sans doute, à ce qu'une vérité meilleure
encore soit trouvée. Néanmoins, le manipulé ne serait
pas celui que l'on croit. Dans quelle situation se sort t-on toujours d'affaire
sinon dans son propre rêve ? Vous est-il arrivé de vous sacrifier
personnellement dans un de vos rêves, dans votre univers. Cela ne se
résout que par le réveil, car le suicide n'intervient que dans
la réalité.
Source : http://manocorto.free.fr/univers.htm
1 commentaire:
"L'histoire elle-même ne dure pas très longtemps, peut-être une affaire de quelques jours, quant à savoir quand est-ce qu'elle se passe, cela n'a pas d'importance. [...] Ici, le destin de deux galaxies se rencontrent, celle des Humains avec celle des Bergs ; cette dernière porte le nom d'Atrii."
L'influence du roman Dune sur Alejandro Jodorowski est évidente puisqu'il a travaillé sur l'adaptation en film ... chef-d’œuvre qui ne sera jamais réalisé; les studios d'Hollywood lui préférant une version plus "lisse".
Chronologiquement, je situe personnellement l'épopée de L'Incal après celle de Dune par rapport au nombre de planètes majeures évoqué : 22.000 dans l'Incal et seulement 13 ou 14.000 dans Dune ; et bien plus proche du jeu de rôles Empire Galactique qui lui annonce 25.000 planètes majeures.
Quant au lieu, il s'agit de la galaxie Voie Lactée (pour les Humains) et d'une galaxie nanie satellite pour les Bergs ("Atrii" ou "Atriili" dans leur dénomination).
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