Les nouvelles se déroulant au XXe siècle voient déjà des inventions étranges, comme les "Villes roulantes", des sortes de trottoirs roulant à grande vitesse (un prétexte pour des histoires dénonçant le pouvoir des syndicats, Heinlein passant de son socialisme d'avant-guerre à un ultra-individualisme libertarien). Il y a aussi un programme d'eugénisme secret depuis la fin du XIXe siècle, qui va manipuler des familles pour créer un groupe à la longévité accrue, les Familles Howard, dont le membre le plus célèbre est le quasi-immortel Woodrow Smith, dit "Lazarus Long", qu'on retrouvera dans toute l'Histoire de l'Avenir, puisque né au XXe siècle, il vivra au moins jusqu'au XLIIIe siècle.
La Lune est conquise vers 1978 par un génial entrepreneur privé, D.D. Harriman, qui voulait éviter que l'Etat n'y arrive avant (Heinlein a dès lors basculé dans un Randisme qui rend ses textes parfois si pleins de sermons anti-statistes).
Si on voulait inclure le roman plus tardif Stranger in a Strange Land (1961), ce serait sans doute aussi dans cette période d'exploration. Valentin Smith est le fils des premiers humains partis vers Mars mais après leur mort, il a été élevé par une race mystérieuse de Martiens qui ignorent tout concept de propriété et qui ont développé ses pouvoirs psychiques. Quand Smith est ramené sur Terre, il devient une figure messianique de libération (psychique et sexuelle), fonde l'Eglise de Tous les Mondes, mais finira en martyr lacéré par ses propres fidèles avant de dépasser ce monde.
Plusieurs nouvelles traitent la colonisation privée de la Lune et Luna City au tournant du XXIe siècle, puis du reste du système solaire. La planète Venus est colonisée avec un système capitaliste qui restaure l'indenture des travailleurs qui doivent payer pour leur voyage. Elle gagne son indépendance de la Terre au XXIe siècle (de même que la Lune se révolte et déclare son indépendance en 2076 dans The Moon is a harsh Mistress (1966), qui n'appartient pas exactement à la même continuité mais qui semble avoir repris les idéaux anarcho-libertariens de l'Eglise de Tous les Mondes de Valentin Smith).
Au début du XXIe siècle, aux élections de 2012, un prophète religieux fanatique, le révérend Nehemiah Scudder devient Président des Etats-Unis d'Amérique & Australasie et instaure une dictature théocratique puritaine. Il faudra une Révolution libertarienne pour renverser le régime de New Jerusalem avec un société secrète d'hommes d'affaires. On met en place un nouveau régime démocratique libertarien appelé le "Covenant" (individualisme assez différent de la timocratie militariste dont on trouve l'éloge dans le roman hors-Histoire du futur, Starship Troopers, 1959). Les amateurs du jeu de rôle Space Opera retrouvent presque exactement cette opposition entre une Terre obscurantiste et fondamentaliste au XXIe siècle puis un mouvement "Covenantiste" dans la chronologie officielle du monde dans l'Atlas I.
C'est à partir du XXIIe siècle que les vaisseaux vont franchir le système solaire. L'un des premiers Vaisseaux Génération est envoyé vers Proxima du Centaure et il va voir son équipage dégénérer au fil des décennies en un monde fermé de basse technologie qui croit que le Vaisseau est l'Univers (Orphans of the Sky, mai 1941, l'inspiration du premier jeu de rôle de SF Metamorphosis Alpha). Ce n'est que des milliers d'années après que la Terre reprendra contact avec ce Vaisseau.
Le XXIIe siècle est aussi l'époque où des membres des Familles Howard (les groupes sélectionnés génétiquement pour vivre plus longtemps) doivent s'enfuir de la Terre parce qu'on veut analyser le secret de leur longévité. C'est sur une autre planète qu'ils rencontreront des extra-terrestres immortels et découvrent le premier vol plus rapide que la lumière (Methuselah's Children (juillet-septembre 1941). Conduits par Lazarus Long, ils décident de revenir sur Terre, où les humains ont pu accroître leur longévité artificiellement sans parasiter les Howards, et révèlent ce qu'ils ont découvert. Lazarus Long clôt la chronologie par une boucle, en partant voyager à travers le temps (où il séduit sa propre mère au XXe siècle, un peu comme dans sa célèbre nouvelle de 1958, All You Zombies) et à travers les dimensions (où il entre ainsi dans les univers des autres romans de Heinlein).
On remarque que l'Histoire Future d'Heinlein s'arrête assez tôt dans le développement d'une Civilisation humaine au début de l'exploration interstellaire. Contrairement à beaucoup d'oeuvres de SF, il n'y a pas vraiment d'Empire multiplanétaire, probablement parce que cela contredirait un peu les thèmes individualistes (mais dans le plus militariste Starship Trooper, il y a bien une Fédération terrienne). Il y a aussi très peu d'extraterrestres en dehors des Martiens dans le cycle de Stranger in a Strange Land et Podkayne of Mars ou cet esprit collectif que rencontrent les Howards dans Methuselah's Children. L'ambiance est dans l'ensemble plutôt optimiste, en dehors de la dictature religieuse au XXIe siècle et la tendance est plutôt d'aller vers une utopie libertarienne.
Chronologiquement, Asimov a commencé le cycle de Fondation en feuilletons dès 1942 mais on divise son histoire en trois périodes : l'époque des Robots (Futur proche), l'époque des Empires interstellaires (jusqu'aux années 25 000 environ) et enfin le cycle de Fondation proprement dit (qui commence vers 12 000 de l'Empire galactique).
Ce site a une chronologie assez détaillée mais Wikipedia donne aussi une histoire limitée à la période de Fondation.
Voici un résumé :
XXIe La robopsychologue Dr. Susan Calvin (1982-2064) développe la compréhension des nouveaux Robots au cerveau positronique et les Trois Lois de la Robotique.
Premier saut interstellaire en 2029. L'Humanité se scinde entre les Terriens, conservateurs luddites, et les "Spacers", plus avancés, qui colonisent les autres mondes, dont Aurora (Tau Ceti).
XXXVIe (ou LIe siècle selon les versions) Les Spaciens développent le robot intelligent de forme humaine R. Daneel Olivaw, qui va tenter de rapprocher Terriens et Spaciens. Le robot R. Giskard Relentlov intervient pour rendre la Terre inhabitable et pousser les Humains à quitter leur planète, ce qui aurait pour conséquence de redynamiser l'Humanité (mais les textes historiques diront de manière erronée qu'il y a eu un conflit nucléaire).
12,500 Fondation de l'Empire galactique sur la planète Trantor. R. Daneel Olivaw jette les bases de "Gaia", la planète intelligente.
24,500 Après 12000 ans de paix, le psychohistorien Hari Seldon, aidé par le robot R. Daneel Olivaw, prédit l'effondrement à venir de l'Empire Galactique. Création de la Fondation sur Terminus pour minimiser la période des ténèbres après la chute de l'Empire grâce au projet de l'Encyclopedia Galactica.
24,800 Un Mutant télépathe surnommé "le Mulet" perturbe tout le Plan de Seldon et capture la Fondation.
La Seconde Fondation de Star's End (Trantor) réussit à le manipuler pour mettre fin à sa menace.
25,000 La Fondation retrouve Gaia, planète intelligente qui a permis le Mulet, et qui doit évoluer un jour vers la Singularité. Elle retrouve aussi la Terre et le Plan psychohistorique du robot R. Daneel Olivaw.
Vers 30,000 (?) Gaia doit devenir "Galaxia", la Galaxie Intelligente.
Comme chez Heinlein, l'histoire est plutôt optimiste, voire franchement utopiste, malgré une phase de régression des Terriens face aux Emigrés spaciens dans les prochains siècles. Asimov s'interdit toute vie non-humaine en dehors des Robots dans ce cycle. L'Histoire n'est donc que celle de l'Humanité se développant et apprenant enfin à se connaître et à réaliser son potentiel, grâce aux Robots et aux sciences. Chez Heinlein, l'individu doit périodiquement se révolter contre la perte d'individualité, sans vraie utopie finale (Lazarus Long choisit de refuser une immortalité sans individualité) alors que les Robots d'Asimov accomplissent par leurs équations psychohistoriques une victoire déterministe de l'Humanité.
4 commentaires:
L'indenture est un mot anglais désignant un contrat synallagmatique (Qualifiant les contrats qui contiennent obligation réciproque entre les parties) que l'on traduit au sens actuel au Canada par contrat d'apprentissage. Auparavant il s'apparentait à du servage ou à l'engagisme, un système similaire utilisé dans l'empire colonial français.
La timocratie ou timarchie est un régime politique évoqué par Platon, au Livre VIII de La République : c'est le gouvernement par ceux qui recherchent ce qui a du prix, de la valeur.
L'ambiguïté du terme « valeur » en français est aussi présente dans la langue grecque: Timô, c'est fixer le prix d'une chose, mais aussi juger digne, récompenser, honorer, respecter.
Timokratia, c'est l'État dans lequel la recherche des honneurs est le principal mobile.
Pour mémoire, « kratô » signifie dominer, régner. Dans la République, au livre VIII, Platon nomme « timocratie » la première étape de la dégénérescence du gouvernement de la Cité idéale, dans laquelle les meilleurs conduisent la vie politique, c'est-à-dire où une aristocratie est mise en place.
Pour Platon, la timocratie est le gouvernement des guerriers, commandés néanmoins par les passions nobles, celles du cœur.
Les jeunes gens (filles et garçons) sont éduqués en communauté, et l'on choisit parmi eux ceux qui font preuve de courage, d'abnégation, de détachement à l'égard du monde sensible, pour en faire les gardiens de la Cité. Et parmi ces derniers, l'on retiendra ceux qui ont à la fois un goût pour la gymnastique et pour l'art de ces filles de Mnémosyne et de Zeus (ou de la Terre et du Ciel selon d'autres traditions) qui président à la Pensée sous toutes ses formes, les Muses. Platon utilise le terme de « Musique » en ce sens. Ces jeunes gens, montrant un goût pour les études intellectuelles, seront les philosophes, dont on fera des gouvernants.
Mais la Cité, née dans l'Histoire, est fille de l'Histoire, et donc conduite à changer. Or ce qui est parfait ne peut, en changeant, que se dégrader. Alors, même ceux qui ont le « naturel philosophe » sont pervertis par le spectacle des injustices et des grossiers plaisirs, - mais aussi par les sophistes, ces maîtres à ne penser qu'en termes de conquête du pouvoir, et non en termes de recherche du bien et du juste, autrement des maîtres qui détournent leur élève de l'authentique exercice de la pensée.
Ces jeunes gens, promis à devenir gardiens de la Cité, prennent goût à ce pouvoir qu'on leur présente comme une fin en soi. Ils n'acceptent plus d'obéir aux philosophes, pratiquent la gymnastique plus que la « musique », ils cultivent la force physique, ils sont férus d'honneurs qui leur confèrent des privilèges. Finalement, cette quête incessante des honneurs ne peut que se transformer rapidement en une quête de richesses. Faisant à la fois montre de gloriole et de cupidité, ces jeunes gens croient que la possession est à l'origine de la valeur. Arrogants, hautains, féroces à l'égard de ceux qu'ils tiennent pour inférieurs et qu'ils méprisent, dociles et même serviles à l'égard de leurs chefs, les hommes de la timocratie prennent pour vertu leur amour de la chasse et de la guerre.
La timocratie dégénérera en oligarchie quand le goût pour l'or et les dépenses s'emparera plus encore de ceux qui détiennent le pouvoir. Dans leur esprit, la richesse se substituera définitivement à la vertu. Le gouvernement sera alors aux mains d'un petit nombre de personnes opulentes.
Le Cycle de Fondation se déroule environ 22 000 ans dans le futur de l'Humanité, qui s'est répandue dans toute la Galaxie, occupant 20 millions de planètes avec un quintillion (un milliard de milliard en échelle courte) d'êtres humains. Tous ces mondes sont regroupés dans l'Empire Galactique, qui a pour capitale Trantor, la planète habitable la plus proche du trou noir central.
En l'an 12 065 de l’Ère Galactique (démarrée à la création de l'Empire), Hari Seldon, mathématicien âgé, fait beaucoup parler de lui. Se basant sur la psychohistoire, science qu'il a inventé et qui permet de prédire l'avenir grâce aux mathématiques, il annonce publiquement que la chute de l'Empire est proche, et inéluctable. Trente mille ans de barbarie sont au programme.
Pour pallier cela, Seldon a secrètement mis au point le Plan Seldon, dont le but est la constitution, au bout de mille ans seulement, d'un Second Empire Galactique, encore plus grandiose que le premier. C'est pour le mener à bien qu'il crée deux Fondations, de structures opposées mais d'égale importance.
La Première, publique, et ignorant tout du Plan, part s'installer dans les extrêmes limites de la Périphérie Galactique, sur la planète Terminus. L'autre, secrète, chargée grâce à la psychohistoire d'assurer la réalisation complète du Plan, est situé à Star's End « là où finissent les étoiles. ».
La série suit principalement l'évolution historique, sociale, économique et politique de la Première Fondation, qui se développe comme une entité politique normale, à la seule différence près que ses habitants possèdent une certaine sérénité : puisque Seldon a prédit qu'on s'en sortirait, et puisqu'il était "savant", on a tout intérêt à le croire ! Quoi que l'on fasse, on est sûr de le réussir : c'est Seldon qui l'a dit ! Et c'est précisément ce que Seldon voulait. Grâce à cette confiance, les habitants de la Fondation vont s'étendre dans la Galaxie décomposée, entreprenant sans le savoir la réunification.
Le Cycle entier s'étend sur 500 des mille ans du Plan Seldon. Aussi, il y a entre chaque nouvelle ou roman un "bond dans le temps" allant de 50 ans à deux siècles, et chaque histoire présente sa galerie de personnages, avec ses enjeux bien de son temps et de son époque, ce qui procure une grande variété d'intrigues.
Une des merveilles du Cycle de Fondation est que l'on voit la Fondation évoluer sans même s'en rendre compte. Les personnages d'une nouvelle sont devenus des héros historiques dans la suivante, et ce qui était une quête entrainante d'un personnage devient finalement un conte, une légende, ou un acte fondateur presque sacré.
De façon générale, on remarque une nette évolution du style entre la trilogie originelle et les ajouts ultérieurs. Tout d'abord, Fondation foudroyée et Terre et Fondation sont des romans, l'un étant la suite immédiate de l'autre, formant une odyssée galactique de forme longue, plus en adéquation avec le style actuel, qui contraste avec la trilogie composée de nouvelles fixées sur des moments extrêmement précis de l'histoire (d'ailleurs la longueur des nouvelles augmente au sein de la trilogie).
Une autre différence est la disparition totale des passages de l'Encyclopedia Galactica, qui rythmaient la trilogie originelle à chaque début de chapitre et contribuaient beaucoup de par leur style à "l'ambiance" du récit. Asimov les réintroduit dans Prélude à Fondation et L'Aube de Fondation, en les mêlant à la vie de Seldon, qui par ailleurs est décrite comme une odyssée dans Prélude à Fondation, ressemblant aux romans, et comme une suite d'instants importants mais très espacés dans L'Aube de Fondation, ressemblant à la trilogie originelle.
L'œuvre d'Olaf Stapledon influença directement des auteurs comme Arthur C. Clarke, Brian Aldiss, Stanislas Lem et John Maynard Smith et indirectement un grand nombre d'autres auteurs, fournissant une large contribution d'idées nouvelles au genre de la science-fiction (la plupart d'entre elles étant inspirées de lectures philosophiques). Son idée d'empires englobant plusieurs galaxies inspira de nombreux auteurs de science-fiction comme Edward Elmer Smith, Alfred Elton van Vogt ou Isaac Asimov.
Bien que son œuvre ait été écrite avant l'apparition du mouvement appelé « transhumanisme » (1966), les thèmes de la condition transhumaine et du super-esprit composé de nombreuses consciences individuelles sont des thèmes récurrents dans son œuvre. Son roman intitulé Créateur d'étoiles (Star Maker) contient même la première description connue de la célèbre sphère de Dyson. Freeman Dyson déclara que ce fut le roman qui lui en fournit l'idée première. Les Derniers et les Premiers (Last and First Men) propose également une description d'ingénierie génétique et de terraformation. Son roman Sirius décrit également un chien dont l'intelligence égale celle d'un être humain, comme plus tard dans Demain les chiens de Clifford D. Simak. Ce dernier roman fut tout d'abord refusé par son éditeur à cause de quelques scènes sexuellement explicites.
Ses œuvres de fiction représentent souvent une quelconque intelligence écrasée par un univers totalement indifférent. Ses romans présentent souvent des protagonistes tourmentés par le conflit entre leurs bas instincts et leurs hautes aspirations. Les romans Les Derniers et les Premiers (Last and First Men, une histoire anticipée de l'humanité) et Créateur d'étoiles (Star Maker, une histoire esquissée de l'univers) en particulier furent encensés par des personnages aussi divers que J. B. Priestley, Virginia Woolf et Winston Churchill. Leur philosophie rebuta en revanche C. S. Lewis, dont la Cosmic Trilogy fut écrite en réponse à l'amoralité qu'il percevait dans les romans de Stapledon. En fait, Stapledon était agnostique et hostile aux institutions religieuses, mais non aux aspirations religieuses, ce qui lui valut quelques différends avec H. G. Wells tout au long de leur correspondance.
Aucun de ses romans ou aucune de ses nouvelles n'ont été portés à l'écran, bien que George Pal acheta les droits pour « Odd John » (un roman qui propose l'arrivée de mutants supérieurs à l'homme qui remettent en cause les valeurs culturelles de l'humanité). Mais l'œuvre de William Olaf Stapledon semble trop diffuse et trop complexe pour permettre une adaptation cinématographique.
William Olaf Stapledon donna des cours de philosophie à l'Université de Liverpool (qui héberge aujourd'hui les archives Olaf Stapledon), mais également des cours de littérature anglaise, d'histoire de l'ère industrielle et de psychologie. Il écrivit par ailleurs de nombreuses livres sur des sujets politiques ou éthiques dans lesquels il défendait l'accroissement des « valeurs spirituelles » qu'il définissait comme des valeurs exprimant le désir d'une plus grande conscience de soi dans un large contexte (« la personnalité dans la communauté »).
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