EHA est un immense conglomérat de documents, pièces, ballades,
comptines, slogans écrits sur des murs, bandes dessinées – allant des œuvres
les plus cultivées et durables, aux œuvres éphémères, ayant en commun seulement
le fait qu’elles fournissaient des informations sur les règnes de Paul, Alia et
Leto II. Une grande partie du matériel se transmettait de bouche à oreille
jusqu’au milieu du 139e siècle, quand le recueil commença. D’autres
œuvres, comme les pièces de Harq al-Harba et d’autres dramaturges Atréides,
furent imprimées dès leur conception. Mais l’intérêt principal du EHA, depuis
toujours, était les informations issues de la tradition orale distincte, à
cause de son indépendance, ce qui pouvait servir à confirmer et à vérifier les
documents officiels.
Plusieurs exemples de documents de l’histoire orale permettent de
clarifier leur nature. En 10330, Rauvlee Ludgwit publia une série de vers sur
les enfants arrakeen et les villages environnants. L’ouvrage contenait des
vers, des comptines, des souvenirs, des vers pour les cordes à sauter et autres
jeux ou articles similaires. La compilation de Ludgwit fut l’un des premiers
ouvrages à avoir été réimprimé dans le EHA (Satra Shonjiir, Trans. L’enfance Arrakeen, de ludgwit,
EHA 37). Sur les 941 éléments de la compilation, il y a une comptine de 10324
qui fait référence à l’utilisation des atomiques par Paul pour ouvrir une
brèche dans le Mur du Bouclier arrakeen, lui permettant de vaincre l’Empereur.
La traduction de Shonjiir concerne le rythme et le modèle des rimes
originales :
Paul, Paul est
venu à travers le mur.
Adam Shaddam
avait une feuille en aluminium ;
Tous ses hawets,
tous ses hommes
Ne pouvaient pas
le soulever à nouveau.
Le mot hawets, dans la troisième ligne, n’a aucun sens dans ce contexte,
car il signifie « poissons », une créature connue sur Arrakis
qu’après l’importation de ce prédateur pour garder les qanats. Les poissons ne
jouent pas non plus un rôle quelconque dans l’incident sur lequel repose la
rime. Ludgwit partait du principe que la transmission orale ne devait pas
utiliser des mots vide de sens, il les remplaçait donc par des mots significatifs,
souvent au détriment de l’idée générale du passage, c’est ainsi qu’il modifia
le mot de la ligne 3 en hawats, ce qui signifie « hommes tatoués »,
du nom de Thufir Hawat, le mentat du Duc Leto, qui accepta de servir la Maison
Corrino après la mort du Duc. Le poème stipule que Hawat était loyal, dans
l’esprit populaire, à la Maison Impériale et donc considéré plus ou moins comme
un traitre envers les Atréides. Mais les découvertes récentes sur Rakis
prouvent que cette conclusion est erronée.
Un exemple plus long d’E.H.A., qui conteste la version officielle de
l’empire au cours du règne de Leto et qui sombra dans une placidité glaciale,
est le premier modèle de satisfaction des bourgeois et des artisans dans la
capitale arrakeen. C’est à peine si un chapitre de l’histoire officielle montre
la satisfaction de l’homme ou de la femme ordinaire durant ce long laps de
temps. L’historien a des principes de base pour démêler la vérité entre
l’histoire officielle et l’histoire orale, mais l’histoire orale contredit
constamment la version officielle pour « le jardin d’Arrakeen ». Un
des nombreux projets de travail qui nous donne une image différente de la
capitale durant le règne de Leto, est la ballade Lewin au Mur qu’un troubadour ramena de la planète peu
connue de Stormstile en 13934, et qu’il avait intitulée Nouvelles d’Arrakeen. Le personnage principal de ces titres
est historique : Iir Zhiil Lewin (11357-11891 ?), un charpentier
originaire de Libermann qui vint s’installer en Arrakeen.Il est cité dans les
archives de la Cour municipale de cette ville comme ayant été arrêté pour
violation d’autorisation en 11890 ; son cas fut médiatisé comme un exemple de fermeté
gouvernemental concernant la protection des consommateurs contre les abus des
revendeurs. Selon le règlement définitif de l’accusation, Lewin mourut en
prison alors qu’il attendait son jugement. La ballade[2]
raconte une autre histoire.
Comme Lewin
coupait sa pomme
Il trouva un ver
à l’intérieur.
Il le tua avec
sa lourde chaussure
Et parla ensuite
avec fierté :
Le ver a mangé
le noyau de la pomme,
Sous la peau il
s’est faufilé
Juste assez pour
qu’un homme se trouve mal
A l’énoncé du
mot ver.
Alors il prit
son pinceau, du goudron et un poinçon
Et sortit du
chemin,
Pour trouver une
place sur un mur,
Sur lequel il
avait son mot à dire.
Et ce soir-là,
il peignit sur le mur,
Pour dire au
monde son histoire,
Et il montra la
ville à la lumière du matin,
Celle-là n’était
pas à vendre.
Les prêtres du
temple, qui le haïssaient,
Mirent sa tête à
prix ;
Mais l’espoir
qu’ils avaient était mince ou inexistant,
Jusqu’à ce
qu’ils offrent de l’épice.
Puis, Al-Badawi,
le fils du boucher,
Dit :
« apportez une douzaine de mains,
Et laissez le
bétail l’acculer,
Ainsi vous
n’aurez qu’à le prendre ».
Ils vinrent
ensuite, dans l’obscurité de la lune,
Alors que
l’ombre couvrait tout,
Et il entendit
Lewin chanter sa chanson,
Alors qu’il
peignait sur le mur.
O, les gardes
fremen étaient rapides et tout,
Mais Lewin était
encore plus rapide,
Et le premier
qui vint vers le mur,
Fut le goudron
qu’il rencontra.
Le second donna
sa parole
Qu’il le tuerait
de sa main.
Mais Lewin tira
l’épée fremen.
Et son eau coula
dans le sable.
Le troisième
chat eut Lewin au genou,
Il le coupa avec
un coup porté vers le bas ;
Mais avec son
poinçon, et aisément,
Lewin se tourna
et le trouva.
Comme Lewin
gisait sur le sol,
Ils lui
attachèrent rapidement les mains.
Et il appela,
« amis O, O amis autour,
Ce jour-là
sera-t-il mon dernier »
Maintenant,
Lewin, nous allons en voir plus,
Ils frottèrent
les murs pour les rendre propres ;
Mais une
excroissance de ver se cachait dans le noyau
De la ville
d’Arrakeen.
Quelle que soit la vérité historique de la ballade, il faut noter que,
en règle générale, les gens ne firent aucune concession au héro.
Bon nombre de matériaux de l’histoire orale montrent une satire mordante
et une juste appréciation de la réalité politique. Dans le Petit livre des énigmes, probablement celui publié
anonymement sur Giedi Prime, l’énigme 88 est la suivante : « Qui va à
quatre pattes le matin, sur deux jambes l’après-midi et rampe le
soir ? » Et la réponse est : « Rien que je
connaisse ». Le contenu de ce petit livre est plus vieux de quelques
générations de sa première publication, aux environs de 13499 (E.H.A. 534,
trad. Hwen Urtorn).
Ces exemples montrent les richesses que peut contenir l’histoire orale.
Sa valeur est incalculable à plus d’un titre car elle est non seulement une
source indépendante d’informations historiques, mais elle montre également
l’esprit des gens, nous fait partager la compréhension de leur culture et
affiche « leurs espoirs et leurs craintes ». Ces derniers aperçus
sont illustrés dans « Comment Muad’Dib obtint son nom » [voir
l’article] (un conte fremen* qui mêle des incidents entièrement imaginaires
avec des faits réels) : comment Paul Atréides s’adapta au désert et aux
coutumes fremen et comment l’invention du marteleur attira Paul), son
aboutissement à l’acquisition de pouvoirs surnaturels (exprimé dans la magie du
djinn), et surtout sa conquête de lui-même. À long terme, il importe peu de
quel côté Thufir Hawat était ; ce qui est plus important est la façon dont les
gens structurèrent et ordonnèrent le flux de leur vie quotidienne et comment
ils acquirent un sens du tourbillon des grands événements. Dans ce domaine et
d'autres contes, dans les ballades, même dans les jeux les plus humbles, nous
avons cet enregistrement. W.E.M.
[1] Lors Karden, Vérités et fantaisies dans l’histoire
orale (Yorba : Rose), pour une introduction à une série d’études
dans l’histoire des Atréides.
[2] Zheraulaz Kiit,
éd. Ballade à la frontière des étoiles,
étude de l’histoire des Atrèides 263 (paseo : institut de culture
galacto-fremen) pp. 156-7.
Source : http://pivoine923s.blogspot.com/2016/09/histoire-orale-l.html
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